L’été 2022 va-t-il accélérer les efforts de la France pour lutter contre le changement climatique ?
L’été 2022 a été une saison record, marquée par de nombreuses vagues de chaleur, des incendies de forêt et une sécheresse sévère. Ces événements climatiques extrêmes semblent avoir sensibilisé les Français au changement climatique. Mais des actions concrètes suivront-elles ?
Canicules, incendies, sécheresses, orages violents… l’été 2022 a battu tous les records. Avec des températures supérieures de 2,3 degrés à la normale pour la saison, il s’agit du deuxième été le plus chaud de France métropolitaine depuis 2003, selon Météo France le 30 août. Le service météorologique français a également averti que cet été pourrait devenir la norme dans les décennies à venir.
Le même jour, Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition énergétique, a comparu France Inter Il a pointé du doigt les « aléas météorologiques majeurs », les sécheresses et les incendies massifs, ainsi que les « conséquences sanitaires » qu’ils engendrent.
« Les experts sont très clairs sur le sujet, (…) l’été 2022 sera peut-être le plus étonnant que vous ayez vu ou que vous vivrez dans les 20 prochaines années », a-t-elle déclaré.
Ces derniers jours, de nombreux sondages ont révélé que de plus en plus de Français associent les événements extrêmes de cet été au réchauffement climatique, qu’ils ont peur d’être personnellement touchés et sont prêts à adapter leur comportement.
Selon Sondage YouGov Pour le HuffPost, près de 9 Français sur 10 voient le lien entre climat extrême et réchauffement climatique, et sont prêts à adapter leur comportement. L’Institut Odoxa a mené une enquête auprès de France Bleu Ce qui révèle que plus de 7 Français sur 10 (71%) craignent d’être personnellement impactés par les événements climatiques.
Déjà-vu 2003 ?
L’été dernier, le réchauffement climatique est devenu une réalité pour les Français, qui s’inquiètent de plus en plus des changements climatiques extrêmes.
Ils n’ont certainement pas épargné. Cet été, la France a connu trois canicules dont une début juin. Sécheresse exacerbée par la chaleur et le manque de pluie. De violentes tempêtes et des incendies de forêt ont ravagé de nombreuses régions de France.
Jan Guzel, climatologue et ancien vice-président du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), a noté que la sensibilisation du public est en hausse, recevant de plus en plus de demandes d’entreprises et d’associations pour des conférences et des demandes des médias. Le climatologue, auteur de plus de 250 publications scientifiques, dit recevoir désormais jusqu’à 10 candidatures par semaine. « Cela n’a jamais été le cas auparavant », poursuit-il.
Cependant, il reste prudent, affirmant que « le problème n’est pas la prise de conscience mais l’action ».
« Après l’été 2003, nous avons également dit qu’il y avait une prise de conscience. Un été normal a suivi, puis tout est redevenu comme avant », dit Guzel, craignant que l’effet de l’été dernier ne dure pas longtemps non plus. « Nous aurons un ou deux étés réguliers et l’inaction sera à nouveau à l’ordre du jour. »
Les Français sont-ils sceptiques sur le climat ?
Est-ce le signe d’un déni français de la réalité du réchauffement climatique ? Plusieurs médias ont récemment semé la confusion en partageant un fichier Organisation pour la coopération et le développement économique L’étude (OCDE), menée dans 20 pays et publiée en juillet, a révélé que 57% des Français pensent que « le changement climatique existe et est causé par l’homme ». Selon ces chiffres, 43% des Français ne croient pas à cette affirmation, malgré le consensus scientifique sur le sujet.
Mais cela signifie-t-il vraiment qu’un Français sur deux est sceptique face au changement climatique ?
Non, dit l’auteur principal de l’étudeAntoine Deschlesbrieter, notant que l’étude s’intéresse davantage à savoir si la population soutient les politiques publiques mises en place pour lutter contre le changement climatique.
Dans ce cas, les 43% de Français qui ne croient pas que l’humanité ait quoi que ce soit à voir avec le réchauffement climatique, se trompent tout simplement.
Cependant, souligne Jouzel, les Français sont encore un peu lents à accepter que l’homme soit à l’origine du réchauffement climatique.
En avril 2021, une enquête d’opinion révélait qu' »un Français sur cinq (21%) ne croit pas au réchauffement climatique ».
« Certains acceptent la réalité du réchauffement climatique mais n’acceptent pas le fait qu’il y ait un lien entre le réchauffement climatique et les activités humaines ; d’autres l’acceptent mais pensent que la technologie résoudra tout, ce qui est très dangereux », explique le climatologue, ajoutant que le climat les sceptiques sont moins clairs qu’ils ne l’étaient il y a dix ans.
Il n’en reste pas moins que les Français semblent aujourd’hui plus concernés par ce phénomène. Selon un sondage Ipsos du 25 août, le réchauffement climatique est devenu la deuxième préoccupation des Français (32%), après l’inflation (33%). « C’est le niveau le plus élevé jamais mesuré », a déclaré Matthew Gallard, directeur du Polling Institute, sur Twitter.
Pas « s’adapter », mais « changer » son comportement.
Lorsque Météo France a présenté son bilan été 2022, Samuel Morin, directeur du Centre national de recherche en météorologie, a déclaré que l’été dernier était une « préconception » de l’avenir.
D’ici 2050, « nous nous attendons à ce qu’environ la moitié de l’été soit à des températures proches ou supérieures ». Ce serait le cas même si le monde pouvait contenir les émissions de gaz à effet de serre qui causent le réchauffement climatique.
Si de plus en plus de Français se disent prêts à « adapter leur comportement », Guzel estime que cela ne suffira pas. « Il ne faut pas simplement adapter notre comportement, il faut changer notre comportement, et c’est ce que les Français ne comprennent pas », dit-il.
Evoquant la « sobriété énergétique », qui selon lui est une expression vague qui ne suggère pas de réelles mesures concrètes, le climatologue trouve « dommage » que ce sujet n’ait été évoqué que pendant le conflit ukrainien. « C’est pathétique qu’on n’en parle que maintenant qu’on le sait depuis toujours : la nécessité de remettre la sobriété au cœur de la politique climatique est inscrite dans les derniers rapports du GIEC et dans les recommandations de 150 citoyens », rappelle-t-il. . « Ce ne sont pas seulement des choses marginales qui doivent être faites, pas seulement de petits gestes. »
Cet article est une traduction de l’original en français.