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Doit-on imposer le masque à l’école à partir de 6 ans, comme certains le prétendent?

Illustration d’un enfant avec un masque à l’école. – Pixabay

  • Certaines voix s’élèvent pour demander que le masque soit imposé dès la première année et non plus à partir de la sixième en France.
  • Car les enfants sont certes moins contagieux que les adultes, mais certaines études montrent qu’ils jouent un rôle dans la transmission du coronavirus.
  • La France, confrontée à une seconde vague d’ampleur, doit changer de ton, plaident certains médecins, tandis que d’autres assurent que cette mesure n’est ni utile ni réaliste.

La rentrée scolaire le lundi 2 novembre s’annonce tendue. Aujourd’hui, entre les masques dans les transports, en plein air et en entreprise, il n’y a guère plus que le sourire des enfants que l’on peut encore voir. Cependant, de plus en plus de voix s’élèvent pour exiger qu’elle soit masquée … dès la première année.

Dans un contexte où la deuxième vague de coronavirus trafic
jours difficiles dans les hôpitaux, certains médecins estiment que le masque obligatoire à partir du sixième n’est pas suffisant. Pourtant, depuis des mois, des études françaises et internationales assurent que les enfants de moins de 10 ans sont à la fois peu contaminés par Covid-19 et peu contagieux. Et alors ?

Une idée déjà mentionnée

L’épidémiologiste Dominique Costagliola a assuré dans le Journal du dimanche qu’il aurait fallu, à la sortie de la prison, imposer le masque dès le primaire. Sa collègue Karine Lacombe a fait ressortir le point lundi matin sur LCI.

«Enfin, des médecins très écoutés relaient notre combat», se félicite Michael Rochoy, médecin généraliste à Outreau et co-fondateur du collectif
Arrêtez les Postillons. Qui défend depuis juillet le port du masque à l’école à partir de 6 ans et est à l’origine d’une pétition, publiée dans Le parisien fin août, et signé par de nombreux médecins. Cette proposition a fait boule de neige ces derniers jours sur les réseaux sociaux, derrière notamment
#littleheroes.

L’école joue-t-elle un rôle dans la circulation du virus?

Le protocole défini par l’Éducation nationale est-il trop flexible? «Ce qui est vrai, c’est que les enfants font peu de formes graves de Covid-19. En revanche, ils sont contaminés, tranche Michaël Rochoy. La preuve, certains sont hospitalisés: au 1er septembre, il y a eu 30 hospitalisations chez les 0-9 ans et 29 chez les 10-19 ans. Au 23 octobre, il y avait 80 et 56 ans dans les mêmes groupes d’âge. Si les courbes montrent clairement cette augmentation, rappelons que les mineurs ne représentent que 20 patients sur les 2500 actuellement en réanimation. «Aux Etats-Unis, une étude de l’Academy of Pediatrics a montré que 10,9% des patients étaient des enfants de moins de 18 ans, alors qu’ils n’étaient que 2,2% en avril, période de fermeture des écoles», poursuit Michaël Rochoy. L’école joue-t-elle un rôle dans la chaîne de transmission?

Cette hypothèse va à l’encontre d’une des rares données rassurantes sur ce coronavirus: les enfants sont de «petits» contaminants. Le Conseil supérieur de la santé publique a rendu un avis le 9 septembre sur l’école, recommandant le port du masque à partir de 11 ans seulement. En précisant qu’il «tient compte du fait que les enfants sont peu exposés à une maladie grave et peu actifs dans la transmission du SRAS-CoV-2. Le risque de transmission existe principalement d’adulte à adulte et d’adulte à enfant et rarement d’enfant à enfant ou d’enfant à adulte. « 

« Pour le moment, dans aucun pays il n’a été démontré que les écoliers jouent un rôle important dans la propagation du virus », ajoute Fabienne Kochert, pédiatre et présidente de laAssociation française de pédiatrie ambulatoire (AFPA). Une version confirmée par les statistiques de Santé publique France: 80% des pôles du milieu scolaire sont issus de l’enseignement secondaire (45,7%) et de l’enseignement supérieur (33,3%).

Au niveau européen, le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC) dresse un bilan mitigé sur la contagiosité: «lorsqu’ils présentent des symptômes, les enfants excrètent la même quantité de virus que les adultes et sont donc des contaminants comme les adultes. L’infectivité des enfants asymptomatiques est inconnue. «Si, comme le disent de nombreuses études, la moitié des personnes infectées sont asymptomatiques, comment pouvons-nous nous assurer que les enfants de l’école primaire ne sont pas infectés à la cantine? Puis contaminer les grands-parents lors du déjeuner en famille?

Études contradictoires

Problème: sur cette question, les études scientifiques semblent contradictoires. Une étude française, basée sur 600 enfants d’Ile-de-France, a révélé en juin que les enfants sont beaucoup moins contagieux que les adultes. Données depuis contredites par plusieurs enquêtes, notamment en Israël, en Inde et au Canada. «Les études qui montrent que les enfants ne sont pas contagieux ont été réalisées lors de la fermeture des écoles, celles qui sont parties à partir du mois d’août montrent le contraire», souligne Hélène Rossinot, médecin de santé publique. Alors, une enquête en Inde sur 85 000 cas confirmés de Covid-19, datant de fin septembre, conclut: «Alors que le rôle des enfants dans la transmission a été débattu, nous identifions une forte prévalence de l’infection chez les enfants qui étaient en contact avec des cas du même âge. Nos analyses suggèrent que les interactions sociales entre enfants peuvent être propices à la transmission ».

Preuve supplémentaire que la contagiosité des enfants ne peut être écartée: une étude dans un camp d’été en Géorgie, où 260 enfants ont été infectés sur 344 testés, a montré que les plus petits étaient les plus infectés: 51% des 6-10 ans, 44% des 11-17 ans, 33% des 18-21 ans. « La mise à jour des connaissances n’a pas été faite », regrette Michaël Rochoy.

L’importance de la circulation virale

cependant, l’Organisation mondiale de la santé recommande de porter un masque uniquement à partir de 12 ans. «Mais elle le conseille pour les 6-11 ans dans les zones où le virus circule beaucoup, nuance Michaël Rochoy. Dès août, j’avais prédit que des masques seraient imposés à l’école primaire après la Toussaint. «Même constat du côté d’Hélène Rossinot, convaincue dès l’été de cette mesure, mais pour qui elle est aujourd’hui indispensable, par principe de précaution. «La pandémie est devenue incontrôlable en France. Cependant, le masque est là pour interrompre la transmission. Aujourd’hui, on sait comment on est infecté mais pas où, ça peut arriver pendant le transport, à la cantine, en famille… »

«Dans l’ensemble, les enfants sont moins touchés que les adultes et deux à trois fois moins contagieux, rassure Fabienne Kochert, présidente de l’AFPA. Quand on en dit moins, ce n’est pas nul! Et tout dépend de la circulation virale. Si vous avez plus d’enfants affectés qui continuent à avoir des interactions avec des personnes fragiles, il y aura plus de malades ».

Réaliste?

Doit-on donc changer la doctrine à l’école? Tous sont d’accord sur un point: le masque à lui seul ne suffira pas, et toutes les mesures de barrière doivent être renforcées. «Il faut notamment organiser des cours avec un plus petit nombre, ce que les Allemands ont fait, pour mieux ventiler les classes, renforcer la distance, l’hygiène des mains», énumère le pédiatre.

Mais porter le masque huit heures par jour (surtout pour les enfants qui portent des lunettes …) est certainement plus compliqué que d’ouvrir les fenêtres … Pour de nombreux pédiatres, cette mesure n’est tout simplement pas réaliste. «S’il est mal porté, ce sera une contrainte inutile, soupire Fabienne Kochert. Voyez comment les adultes portent le masque? Imaginez des enfants de 7 ans qui ont le nez qui coule… »Pourtant, les enfants espagnols l’utilisent à partir de 6 ans et aux Etats-Unis, il est recommandé à partir de 2 ans…« Les enfants de 11 ans acceptent très bien le masque, répond Michaël Rochoy . Si seulement la moitié des enfants âgés de 7 à 11 ans le portent bien, ce serait mieux. »Et Hélène Rossinot ajoute:« Soyons honnêtes, nous avons tendance à sous-estimer la capacité des enfants à apprendre, à comprendre et à s’adapter. Lorsque vous l’expliquez bien aux enfants, il n’y a aucun problème à le porter. Malheureusement, ce qui manque depuis le début de l’épidémie, c’est l’éducation. « 



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Delphine Perrault

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