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contre le racisme, les joueurs du PSG – Basaksehir quittent le terrain de la Ligue des champions

Le jeu s’est arrêté. Sur l’écran géant du Parc des Princes, l’horloge indique vingt-deux minutes et vingt-trois secondes. Bloqué pendant des heures. Car mardi 8 décembre, la dernière rencontre de la phase de groupes de la Ligue des champions entre le Paris-Saint-Germain et Istanbul Basaksehir n’a pas dépassé ce temps de jeu. À 21h22 et 23 secondes, les vingt-deux joueurs ont quitté le terrain pour ne jamais revenir. Une décision inédite dans la compétition, à l’instigation des joueurs, reprenant le slogan de l’UEFA,  » Dire non au racisme  » (« Dire non au racisme »).

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Après un début de match instable, la soirée parisienne s’est déplacée vers un quart d’heure de jeu. Sur le banc turc, le staff a agacé les nombreuses fautes sifflées contre leurs joueurs. Retrouvant Pierre Achille Webo, entraîneur adjoint du champion turc, trop véhément, le quatrième arbitre, Sebastian Coltescu, s’adresse à l’arbitre de terrain, Ovidiu Hategan, roumain comme lui: « C’est le noir [negru en roumain] ici. Allez le voir et identifiez-le. Ce mec, le noir », a-t-il dit, selon une traduction de l’Agence France-Presse.

Dans le stade parisien à huis clos, le mot résonne et déclenche la colère de Webo.  » Pourquoi vous avez dit « nègre » ? » (« Pourquoi avez-vous dit « nègre«  ? »), répète l’ex-international camerounais au quatrième arbitre, tandis que les joueurs se rassemblent au bord du terrain. Son expulsion par l’arbitre principal n’apaise en rien les tensions.

Réunis autour de l’arbitre, Stambouliotes et Parisiens reprochent à son assistant d’utiliser un terme raciste. Parmi eux, l’attaquant suppléant de Basaksehir Demba Ba mène la charge. « Quand tu parles d’un homme blanc, tu dis « cet homme« , ne pas « cet homme blanc». Pourquoi tu fais ça avec un homme noir? « , affirme calmement le natif de la région parisienne à l’arbitre. Si ce dernier explique qu’en roumain « Noir » n’a pas de connotation négative, ni les joueurs, ni les officiels, qui ont rejoint le bord du terrain, n’ont été convaincus.

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En 2020, la marre s’exprime

Parce que le racisme dans les stades n’est pas un phénomène récent; de nombreux joueurs ont jusqu’à récemment été la cible d’insultes liées à leur couleur de peau. Lassés, sans doute, de voir que les insultes racistes sont encore courantes dans certains stades sans que les autorités prennent des décisions radicales, les joueurs semblent en avoir conclu qu’ils devaient eux-mêmes mettre en garde sur l’ampleur du phénomène.

Indépendamment des intentions de Sebastian Coltescu, les joueurs ont trouvé Demba Ba un héraut pour verbaliser leurs sentiments. L’ancien bourreau parisien – quand il avait, en 2014, Chelsea s’est qualifiée pour les demi-finales de la compétition dans les dernières minutes – a marché le discours, exhortant ses partenaires à retourner aux vestiaires. «En tant qu’athlètes, nous avons un pouvoir que nous ne connaissons même pas. Si nous nous réunissons et parlons, les choses changent », a-t-il exprimé il y a quelques mois. Engagé contre le racisme, et ne pas mâcher ses mots, l’international sénégalais plaide déjà pour une solution radicale. Il a ouvert la voie.

« Pourquoi dit-il « nègre«  le quatrième arbitre? Allez, on sort! «  Suivi par les vingt-deux joueurs, et la direction des équipes, l’exhortation du défenseur parisien, Presnel Kimpembe, fait écho à un autre départ. « C’est fini. Nous nous levons et nous rompons », écrit Virginie Despentes dans Libération début mars, après qu’Adèle Haenel eut quitté la cérémonie des Césars lors de l’annonce du prix décerné à Roman Polanski. En 2020, marquée par l’engagement de nombreux sportifs, notamment aux Etats-Unis, contre l’injustice raciale, la marre s’exprime.

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Première star qui a tenté d’arrêter un match, à Saragosse, en 2006 – il avait été convaincu de rester par son entraîneur – le Camerounais Samuel Eto’o avait tracé la marche à suivre. «Bien sûr, vous devez quitter le terrain. Le football déplace beaucoup d’argent, mais la plupart des acteurs qui le génèrent sont noirs, a souligné l’ancien attaquant camerounais en 2019 dans La Gazzetta dello Sport. Si un jour avec le soutien des joueurs blancs ils décidaient de ne pas jouer ici, je pense que cela changerait rapidement.  » Contrairement à d’innombrables cas précédents, mardi, personne n’est venu calmer la colère de Demba Ba, aucun partenaire ne l’a poussé à mettre ses sentiments dans sa poche pour que le jeu puisse reprendre.

Scandale de résonance mondiale

« On ne peut pas jouer avec ce gars », A rétorqué Kylian Mbappé au contraire à l’arbitre central, désignant le quatrième arbitre. Comme Neymar, à la suite de Demba Ba, la star parisienne a poussé partenaires et adversaires à retourner aux vestiaires. « Parfois vous décidez vous-même de changer le monde, parfois cela vous tombe dessus », lui a fait profession la footballeuse américaine engagée Megan Rapinoe début novembre, incitant la championne du monde française à prendre davantage position.

En ne refusant pas de reprendre le jeu, et en forçant les organisateurs à reporter  » à titre exceptionnel  » la réunion du mercredi « Avec une nouvelle équipe d’officiels », les joueurs ont changé la donne et ont fait de la prestigieuse Ligue des champions un scandale à résonance mondiale. Outre les nombreux messages de soutien des footballeurs, le président turc Recep Tayip Erdogan, proche de Basaksehir, a repris l’affaire pour « Condamnons fermement les propos racistes faits contre Pierre Webo ». De son côté, la ministre française des Sports Roxana Maracineanu a salué « Une décision historique face à une attitude qui [les joueurs] trouvé cela inacceptable. Une expression du racisme ordinaire ».

Il appartiendra à l’Union des associations européennes de football (UEFA), qui s’est démarquée par son absence de réaction, tentant en vain de reprendre le match en exfiltrant le quatrième arbitre dans le camion affecté à l’arbitre vidéo, pour clarifier le déroulement des événements. . Et de combler l’angle mort de son règlement, qui n’envisage pas d’éventuels comportements racistes de la part du corps arbitral. Dans le silence cathédrale de l’enceinte parisienne à huis clos, les extraits sonores seront plus faciles à analyser que si 47 000 supporters avaient entretenu un bruit d’enfer.

Grâce à la victoire du RB Leipzig face à Manchester United (3-2), le Paris-Saint-Germain a appris dans les travées du stade sa qualification pour les huitièmes de finale de la Ligue des champions. L’objectif initial de cette «Finale», fixé par Thomas Tuchel, l’entraîneur parisien, est terminé. Comme une incursion sportive dans une soirée où l’essentiel est ailleurs. Mardi, à Paris, le match s’est arrêté. Et à leur manière, les footballeurs ont repris leur sport.

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Astor Abel

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