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À Cuba, la police interrompt la grève de la faim des dissidents

Manifestation devant le ministère de la Culture, à La Havane, vendredi 27 novembre.

Les forces de sécurité cubaines avaient besoin d’un prétexte sanitaire pour mettre un terme brutal à dix jours de manifestations sans précédent au cœur même de la Vieille Havane. Arguant un « Violation du protocole sanitaire pour les voyageurs internationaux », en référence à l’arrivée sur les lieux du journaliste et écrivain cubain Carlos Manuel Alvarez, collaborateur à Washington Post et à New York Times, plusieurs dizaines de policiers ont évacué, dans la nuit du jeudi 26 novembre, les locaux du Mouvement San Isidro (MSI), un collectif d’artistes et d’intellectuels dissidents. Six personnes y ont entamé une grève de la faim pour protester contre l’emprisonnement du rappeur Denis Solis au début du mois.

L’intervention, violente et spectaculaire par les moyens engagés, selon les premiers témoignages, a été précédée d’une coupure générale des réseaux Facebook, Twitter et Instagram sur toute l’île. C’est à travers eux que les grévistes et huit autres militants ont communiqué, retranchés ensemble depuis le 10 novembre dans cette maison appartenant à l’artiste et figure de proue du mouvement Luis Manuel Otero Alcantara. Juste avant l’intervention de la police, trois médecins ont frappé à la porte pour vérifier, selon eux, la validité du test Covid-19 de Carlos Manuel Alvarez. Tard dans la nuit, la majorité des personnes arrêtées ont fait savoir sur les réseaux sociaux, à nouveau fonctionnels, qu’elles avaient été libérées.

Peu connu du grand public jusque-là, le MSI, créé en 2018 contre la censure artistique, a largement gagné en notoriété ces derniers jours, même au-delà des frontières, avec cette mobilisation largement relayée en ligne. Au point que, pour de nombreux observateurs, elle apparaît comme l’action la plus importante de désobéissance civile depuis mai 2019, lorsque des militants ont interpellé les autorités en organisant une Gay Pride, malgré son interdiction, au cœur de la capitale cubaine. . La marche s’est terminée par l’arrestation brutale de trois militants, à quelques mètres du Malecon, la célèbre avenue en bord de mer.

«Dialogue impossible»

L’initiative MSI a débuté le 9 novembre. Ce jour-là, le rappeur Denis Solis, jeune chanteur critique du régime, a été arrêté et condamné à huit mois de prison pour «Outrage» à l’autorité. Un fait assez rare à Cuba, où les opposants sont généralement libérés après quelques heures de garde à vue. Denis Solis est accusé d’avoir insulté, trois jours auparavant, un policier (surnommé «poulet en uniforme») qui était entré de force chez lui et sans mandat d’arrêt. Le rappeur a filmé la scène avec son téléphone, avant de diffuser la séquence sur Internet, où l’on voit l’agent masqué prendre également des photos.

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Lothaire Hébert

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