Economy

« Quelle est vraiment la dette publique de la France? »

Patrick Artus

Patrick Artus

(Crédits photo: Flickr - Florent Le Gall)

(Crédits photo: Flickr – Florent Le Gall)

La crise sanitaire poussera la dette publique de la France à 120% du PIB cette année. La question de sa pérennité se pose plus que jamais. Patrick Artus explique pourquoi il est inutile de s’inquiéter de l’augmentation de la dette publique ces dernières années.

Le débat sur la dette publique de la France est intense et pas du tout consensuel. Plusieurs voix habilitées (la Cour des comptes, le ministère de l’Économie, la Banque de France), des hommes politiques et des économistes, se sont inquiétées de l’augmentation du taux d’endettement public de la France (120% du Produit Brut Intérieur à la fin du 2020, après le deuxième confinement), et a envoyé un message négatif: la dette publique devra être remboursée, elle sera donc un fardeau pour les générations futures.

Mais, en même temps, on entend le discours complètement opposé: avec les interventions des banques centrales et des taux d’intérêt à long terme très bas, il est possible d’augmenter considérablement les déficits publics et les dettes publiques, et de réaliser toutes les dépenses publiques qui paraissent nécessaires. . Nous recevons donc à la fois un message «inquiétant» et un message «laxiste», lequel de ces deux messages devons-nous croire?

Mauvaise compréhension de l’état de la dette publique

Le débat sur la dette publique de la France a en effet révélé une méconnaissance assez générale du statut de la dette publique détenue par la Banque centrale, et non par les acheteurs habituels de dette publique (banques, assurances, etc.). La Banque de France appartient à l’Etat français et lui transfère ses bénéfices (elle lui transfère notamment les intérêts que l’Etat lui verse sur les titres publics qu’elle détient). La Banque de France est donc une composante de l’État français: la dette publique qu’elle détient est en réalité une dette d’État achetée par l’État. Il ne faut donc considérer que l’ensemble composé de la Banque centrale et de l’État, et le bilan consolidé de cet ensemble. Au passif du bilan consolidé de la Banque centrale et de l’Etat, on retrouve la seule dette publique qui compte, qui est la part de la dette publique qui n’est pas détenue par la Banque centrale. Le reste de la dette publique, détenue par la Banque centrale, encore une fois, n’existe pas dans la réalité, puisque, même si elle existe à des fins comptables, elle est une dette de l’État sur lui-même.

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Numériquement, le taux d’endettement public de la France devrait atteindre 120% du PIB à la fin de 2020, contre 95% du PIB à la fin de 2014 et 100% du PIB à la fin de 2019; le taux d’endettement public pour la dette publique qui n’est pas détenue par la Banque centrale était le même que le taux d’endettement public total en 2014. Il était de 80% du PIB à la fin de 2019 et sera de 89% du PIB à la fin de 2020 , soit à peu près le même niveau qu’en 2013-2014: il n’y a pas d’augmentation à moyen terme des taux d’endettement public hors holdings de la Banque centrale.

Pas de problème particulier de dette publique

Ce message est très important pour comprendre la situation actuelle. Il n’y a en réalité aujourd’hui aucun problème particulier de dette publique, puisque toutes les nouvelles émissions de dette publique ont été achetées par la Banque centrale. Le scénario de loin le plus probable est que les banques centrales de la zone euro garderont ces titres publics dans leurs bilans, ne les revendront pas et les renouvelleront à maturité, afin d’éviter le retour d’une crise financière. les dettes publiques de la zone euro. Cela signifie que les dettes publiques récemment émises par l’État français n’auront jamais à être remboursées puisqu’elles sont probablement détenues par la Banque centrale, c’est-à-dire par l’État lui-même. Il n’est donc absolument pas nécessaire de s’inquiéter de l’augmentation de la dette publique ces dernières années.

Bien entendu, cette situation peut changer à l’avenir. Si, dans les années à venir, la BCE modifie sa politique monétaire, arrête d’acheter des dettes publiques, alors les déficits publics, s’ils sont toujours présents, deviendront beaucoup plus difficiles à financer, alors les contraintes de solvabilité budgétaire réapparaîtront et les nouvelles dettes publiques réapparaîtront. redeviennent de véritables dettes publiques. Mais ce n’est pas le cas des dettes publiques émises aujourd’hui.

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Beaumont-Lefebvre

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