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Après deux nouveaux tremblements de terre au nord de Strasbourg, la géothermie en question

C’est un tremblement de terre dont l’origine est rare. Un séisme de magnitude 3,5, lié au développement d’un projet de centrale géothermique, a réveillé, vendredi 4 décembre, les habitants de l’agglomération de Strasbourg.

Peu de temps après, un autre séisme de magnitude 2,8 a provoqué l’arrêt des activités de l’usine par l’exploitant, et le projet remis en cause par les élus. Ce choc intervient après plusieurs autres séismes moins intenses enregistrés depuis treize mois et liés à l’activité géothermique, pilier de la transition énergétique en Alsace.

Le Réseau national de surveillance sismique (Rénass) a classé ce séisme survenu à 6h59 « Induit », c’est-à-dire causée par l’activité humaine. L’épicentre du séisme se situe à une dizaine de kilomètres au nord de Strasbourg, à proximité d’un site hébergeant un projet de centrale géothermique porté par la société Fonroche, non encore opérationnel, sur les communes de Vendenheim et Reichstett.

Sur le site, deux puits ont été creusés à 5 kilomètres de profondeur afin de pomper de l’eau chaude souterraine pour exploiter son potentiel énergétique en surface, avant de la réinjecter dans le sous-sol.

Un porte-parole de Fonroche a confirmé à l’Agence France-Presse (AFP) que le choc était bien lié à ses activités. Dans un communiqué de presse, la société a annoncé le lancement d’une procédure de réduction progressive de la circulation de l’eau dans les puits, vers un « Arrêt total ». La procédure « Se déroulera sur environ un mois », dit Fonroche.

Lire aussi Strasbourg: quatre tremblements de terre légers, dont trois causés par l’activité humaine

« Psychose » des habitants

Le choc a été rapidement commenté sur les réseaux sociaux. « A Strasbourg, nous n’utilisons pas de réveil, nous avons des tremblements de terre de magnitude 3,5 à 7 heures », a écrit un journaliste strasbourgeois sur Twitter.

De nombreux internautes réclament la fin des activités géothermiques à Reichstett-Vendenheim. Le tremblement causé « Une psychose » parmi les habitants des villes proches de l’épicentre, a déclaré à l’AFP Georges Schuler, le maire de Reichstett.

Ce dernier a fait état de quelques dégâts matériels et de nombreux appels de résidents paniqués. « C’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Nous demandons l’arrêt définitif de l’exploitation du site », a-t-il déclaré à l’AFP … juste avant une nouvelle réplique, magnitude 2,8 enregistrée dans la même zone à 11h10.

L’abandon du projet n’est pas à l’ordre du jour

D’autres élus des groupes d’opposition de la métropole strasbourgeoise se sont également prononcés pour dénoncer le projet. « Arrêtons de jouer l’apprenti sorcier », a déclaré Jean-Philippe Vetter, président du groupe Les Républicains, dénonçant « Cécité idéologique » élus écologistes en faveur de la centrale géothermique, et exigeant la transparence  » total « .

«Nouveau tremblement de terre à 6h59 ce matin près de Strasbourg (…) nous pouvions tous le sentir #ReNass. Le 11e en un mois, c’est beaucoup et rouvre le débat sur la géothermie profonde. Le débat doit être complet et transparent », a réagi sur Twitter Alain Fontanel, conseiller de l’opposition à Strasbourg.

Un abandon du projet n’est cependant pas à l’ordre du jour, a déclaré le porte-parole de Fonroche. «Le retour d’expérience d’autres centrales électriques de la vallée du Rhin montre qu’une fois qu’elles fonctionnent, elles ne provoquent pas particulièrement de surréaction des roches».

En 2016, l’entreprise a obtenu une autorisation de forage du préfet, contre l’avis des élus des communes concernées. Elle a jusqu’à présent investi près de 90 millions d’euros dans cette centrale, qui vise à alimenter l’équivalent de 10 000 foyers en électricité et 26 000 en chaleur directe.

Une dizaine de shakes en deux semaines

La polémique s’est intensifiée depuis l’enregistrement d’un séisme de magnitude 3,1 le 12 novembre 2019. Son épicentre était situé à 5 kilomètres du site géothermique. Considéré comme d’origine naturelle par Fonroche, il a été classé « Induit » par le Rénass.

« Dans la sismicité induite, il faut distinguer deux phénomènes », explique Jean Schmittbuhl, directeur de recherche au CNRS en sismologie. «Il y a ceux liés à la pressurisation très directe du fluide. C’est ce qui s’est passé ces dernières semaines jusqu’à ce matin. Et il y a la sismicité dite «déclenchée», quand le système, naturellement, était très proche de la rupture, et l’activité humaine est le déclencheur. C’est ce qui s’est probablement passé l’année dernière. « 

D’autres expertises, réalisées à la demande de la préfecture par l’Institut national de l’environnement et des risques industriels (Ineris) et par le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), n’ont pas permis de définir avec certitude l’origine du 2019 tremblement de terre.

Cela avait néanmoins conduit à l’arrêt des opérations d’injection d’eau sur le site géothermique, mais la construction de l’énergie thermique en centrale électrique s’était poursuivie.

En septembre, la préfecture du Bas-Rhin a autorisé la réalisation d’essais dans les puits de l’usine afin de régler la question de l’origine du séisme. Ils ont été suivis de nouvelles secousses répétées, dix en deux semaines entre la fin octobre et le début novembre, qui ont conduit la préfecture du Bas-Rhin à suspendre les opérations. Fonroche a admis que ces tremblements des deux derniers mois étaient dus à ses tests.

Lire aussi La géothermie, pilier de la transition énergétique en Alsace

Le monde avec l’AFP

Astor Abel

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