A Saint-Etienne, un hôpital privé au cœur de la seconde vague
AFP, publié le samedi 07 novembre 2020 à 09:38
«Tant que nous avons une avance en lits, nous sommes sereins»: face à une seconde vague épidémique qui frappe durement la métropole saint-étienne, l’Hôpital Privé de la Loire (HPL) a quadruplé sa capacité d’accueil en réanimation et augmentation des transferts de patients Covid vers d’autres régions, en attendant un pic annoncé à la mi-novembre.
Dans les salles dédiées aux soins intensifs, le souffle des appareils d’oxygénation pulmonaire, moins invasif pour les patients que l’intubation, rythme la matinée avec un tempo trompeusement calme.
Alors que Véronique Angénieux, chef de l’unité de soins, met en garde contre les croisements intergénérationnels pour éviter la contamination des personnes à risque, un homme de 34 ans entre en réanimation.
Masque à oxygène sur le nez, il est entouré d’une nuée d’infirmières en blouse bleue qui lui parlent sans cesse alors que son lit à roulettes est poussé vers ce qui deviendra sa chambre. L’homme sourit douloureusement mais son visage fatigué reflète la saturation dont il souffre. «Il est jeune, il doit réussir le cours», glisse le professionnel.
Depuis deux semaines, le taux d’incidence dépasse les 1 000 cas pour 100 000 habitants dans l’agglomération de Saint-Étienne, selon les données fournies par Santé publique France, le chiffre le plus élevé du pays. Au HPL, principale structure d’accueil des patients les plus sérieux après le CHU de Saint-Étienne, la vague monte inexorablement.
L’établissement, qui a été relativement épargné au printemps avec 26 décès dus à Covid-19, en a déjà enregistré une trentaine depuis un mois. «Et ce n’est que le début», prévient un cadre.
Pour gérer le flux de patients Covid, le nombre de lits de réanimation est passé de 8 à 35, dont 22 dédiés aux patients Covid. Des transferts ont eu lieu depuis mi-octobre, d’abord vers les villes moins touchées d’Auvergne-Rhône-Alpes comme Clermont-Ferrand, puis mercredi vers les régions de l’Arc Atlantique.
«Le but n’est pas de se retrouver dans une situation où il faut choisir de prendre tel ou tel patient, dans une période de tension maximale. Il faut donc faire de la place», analyse Benoît Crémilleux, anesthésiste en réanimation au HPL.
« Même si nous nous préparions » à ce retour du virus, « sans les transferts de patients, nous aurions explosé en vol », explique Jean-Baptiste Séblain directeur général adjoint de l’établissement.
– « Nous voilà » –
Côté équipe, une vingtaine de soignants bénévoles sont arrivés ces derniers jours en provenance d’établissements du groupe Ramsay Santé situés dans des zones plus épargnées par la deuxième vague, comme Bourg-de-Péage (Drôme) ou Bayonne (Pyrénées-Atlantiques).
Dès l’été, un tutorat entre infirmières a également été mis en place au HPL afin de former aux gestes pratiqués en réanimation pour les professionnels travaillant habituellement en salle d’opération ou en ambulatoire. L’improvisation due à la surprise de la première vague a fait place à une préparation méthodique face à un ennemi identifié.
Un réanimateur décrit la résurgence de l’épidémie dans la Loire comme «une marée montante» perçue vers la mi-août, annonçant «un raz-de-marée propulsé début octobre». C’est à ce moment-là que «il fallait rassembler tout le monde et se dire + ça y est, on est là +», dit Mme Angénieux, louant la disponibilité des aidants.
Le responsable de la santé supervise près de 150 infirmières et soignants affectés principalement aux patients Covid, un chiffre qui a triplé en quelques semaines. Des praticiens des spécialités déprogrammées au sein de l’établissement sont également venus soutenir les médecins.
Myriam Mehenni, une infirmière de 23 ans qui a vécu la première vague, sait ce qu’implique le retour du virus: «il va falloir le prendre sur nous, pour être confronté à des patients isolés».
Les visites interdites pendant quelques semaines dans les unités Covid impliquent « d’avoir à réconforter des familles, qui au téléphone sont parfois anxieuses ou en larmes parce qu’elles ne peuvent pas être avec leurs proches », explique la jeune femme qui voit son horizon bloqué par l’épidémie jusqu’au la fin de l’année.
Chez HPL, vampirisé par Covid, seules les urgences oncologiques et chirurgicales ont été maintenues.